Romans de Vance: à la fin…

Les dernières lignes des grands romans de Jack Vance

Le Prince des étoiles

« Gersen parcourut une dernière fois la vallée d’un regard mélancolique. Ce monde avait perdu son innocence première ; il avait connu le mal. Il lui semblait que le panorama s’était terni. Gersen poussa un profond soupir et contempla ce qu’était devenue la tombe de Warweave. Il se pencha, saisit l’arbuste, l’arracha de terre, le brisa et dispersa les fragments à tous les vents. Puis il fit volte-face et remonta la vallée en direction de l’astronef. »

La machine à tuer

« Debout à côté de lui, Alusz Iphigenia pressa doucement sa tête contre son épaule. Plongeant son regard dans l’éblouissante chevelure blonde, il se rappela comment, la première fois qu’il l’avait vue à Interéchanges, il l’avait jugée quelconque. Il laissa entendre un rire tranquille. Alusz Iphigenia releva la tête.

 — Pourquoi riez-vous ?

 — Un jour, je vous le dirai ; mais pas maintenant. Souriant à son tour à quelque souvenir de son cru, Alusz Iphigenia ne répondit rien.  

Gersen abaissa le levier de départ. Trente-six pattes se soulevèrent et retombèrent, dix-huit anneaux s’ébranlèrent. La forteresse démarra en direction du nord-ouest, là où les rayons obliques du soleil couchant éclairaient les cimes enneigées du Skar Sakau. »

Le palais de l’amour

« Asseyons-nous un moment sur ce banc. Je vais vous lire une ou deux ballades tirées des œuvres du poète fou Navarth. Il les a sans doute écrites en pensant à vous. Drusilla I s’assit. — C’est une bien curieuse façon de faire connaissance. Mais je ne suis pas attachée aux conventions. Allons, je vous écoute. »

Le visage du Démon

« Gersen se rendit au communicateur et appela Boisvieilli. On lui passa Adario Chanseth. Ce dernier scruta l’écran.

« Qui m’appelle ?

— Sortez de votre demeure, lui dit Gersen. Un grand visage de Darsh apparaît au-dessus des murs de votre jardin. » Gersen coupa la communication. Il sortit de la Tour Skohune et se rendit à son hôtel. Une fois là, il régla sa note et partit. Un taxi le conduisit au spatioport. Il gagna aussitôt son Voltigeur Fantamique, grimpa à bord, et quitta la planète Methel. »

Le Livres des Rêves

« Dans le Voltigeur et filant à travers l’espace, Alice ramassa Le Livre des Rêves, puis le reposa aussitôt. « Que vas-tu en faire ?
— Je ne sais pas… Le donner à Cosmopolis, je pense.— Pourquoi ne pas le jeter simplement dans le vide ?— Je ne peux pas faire cela. » Alice posa les mains sur son épaule. « Et maintenant, et toi ?— Comment cela, moi ?— Tu es tellement silencieux et abattu ! Tu m’inquiètes. Te sens-tu bien ?— Très bien. Déprimé, peut-être. J’ai été abandonné par mes ennemis. Treesong est mort. L’affaire est terminée. Tout est fini pour moi. »

Les maîtres des dragons

« Le peuple de Banbeck était sorti de ses tunnels et Phadée la ménestrelle vint à la rencontre de Joaz. « Quelle terrible journée ! » murmura-t-elle. « Quels événements atroces ! Quelle grande victoire ! » Joaz lança le morceau de marbre jaune sur le tas de débris. « Je pense comme vous. Où tout cela finira-t-il ? Nul n’en sait rien. Et surtout pas moi »

Les Baladins de la planète géante

« Zamp versa une rasade de cognac dans leurs deux verres. « L’association a été profitable, Throdorus ! » Profitable, instructive et édifiante. Les deux hommes burent, puis se tournèrent pour regarder vers le nord, en amont, l’ombre lointaine des falaises de Mandaman. À ce moment-là, une brise s’écartant des alizés équatoriaux gonfla les voiles. De l’écume à l’avant, un murmure dans le sillage, le bateau s’élança au fil du courant de la Vissel, cap au sud, vers la lointaine ville de Coble. »

Les langages de Pao

« Le pastiche… une synthèse de la langue de Frakha, de techniquant, de vaillant et de paonais. Le pastiche… la langue de l’administration. Dans vingt ans, tout le monde le parlera. Il amendera les vieux esprits, modèlera les nouveaux.

 Leurs regards se perdirent dans la nuit, bien au- delà des lumières d’Eiljanre. Et ils méditèrent. À quoi ressemblera Pao, alors ? »

Clarges (la vie éternelle)

« Le vaisseau quitta lentement le sol. Et, de plus en plus vite, il monta dans le crépuscule. La flamme bleue devint une étoile scintillante, puis diminua et disparut. »

La mémoire des étoiles

« Cela me paraît un excellent programme. Et maintenant commandons-nous une autre bouteille de vin, ou peut-être est-il temps de songer à dîner. »

Tschaï

« La surface de Tschaï s’éloigna. La planète devint une sphère, une boule brunâtre. Bientôt, elle disparut aux yeux des voyageurs. »

Emphyrio

« Dans le Square d’Undle, un mausolée fut érigé pour abriter une châsse de cristal contenant le squelette d’Emphyrio. Sur la porte d’une maison proche, à l’étroite façade, aux fenêtres de verre ambre, fut accrochée une plaque d’obsidienne noire polie sur laquelle on pouvait lire en lettres d’argent :

Dans cette maison vécut et travailla le fils d’Amiante Tarvoke, Ghyl, qui, reprenant le nom d’Emphyrio, honora grandement ce nom, celui de son père, et le sien. »

Chroniques de Durdane

« Etzwane plongea son regard dans les profondeurs du vin frais, étudiant le jeu des reflets et des couleurs. « Il est parti, mais ce soir je n’ai pas le cœur à la musique.

— Le cœur ? se moqua Frolitz. Qui joue avec son cœur ? Les mains, le souffle et une humeur joyeuse, voilà ce qui nous est utile.

— C’est très juste. Mais mes doigts sont engourdis : je vous mettrais tous dans l’embarras. Ce soir, je resterai assis à écouter en buvant un verre de vin ou deux, et demain, nous verrons. » Il tourna la tête vers la porte, bien qu’il sût qu’Ifness était parti. »

Trullion

« Un sentier contournait la bâtisse et descendait jusqu’à l’océan. Glinnes le dévala en courant et vit Duissane debout sur la plage, le regard perdu vers l’horizon, où le ciel se confondait avec les eaux. Il s’approcha d’elle. Elle se retourna et le regarda comme si elle ne l’eût jamais encore rencontré. Puis elle pivota et longea la mer en direction de l’est. Glinnes la rattrapa, et, dans la clarté brumeuse de l’après-midi, ils s’en allèrent côte à côte sur le sable. »

Marune

« —  Nous pouvons vivre comme il nous plaît. Je ne veux que le bonheur pour nous deux. 

— Peut-être aurons-nous envie de voyager vers des mondes lointains. Alors ? Comment les Schardes nous jugeront-ils à notre retour ? Ils nous jugeront souillés… ne nous considéreront plus comme de vrais Rhunes.  Efraïm porta les yeux sur la vallée. « Nous ne sommes pas des Rhunes de l’eau la plus pure, c’est un fait. Eh bien… qu’allons-nous faire ? »

—  Je ne sais pas. »

— Moi non plus. 

Les domaines de Koryphon

« — Que sa haine est grande, murmura rêveusement Schaine. Et songez que c’est nous qui l’avons nourrie par nos actes. Nous étions si vains et si fiers que nous avons toujours refusé d’admettre un uldra dans la Grande Salle. Pensez à la tragédie qui en a résulté ! Mais je me demande si nous tirerons profit de cette leçon. …/…

— Il existe autant de réalités que de personnes, déclara Jemasze. À Suaniset, dès l’instant où une personne est respectable, elle peut s’asseoir à notre table, et peu importe ses vêtements ou la couleur de sa peau. …/…

— Jorjol va s’imposer sur un autre monde, dit Jemasze en constatant que le Prince Gris se dirigeait vers le port spatial. Tous trois descendirent l’avenue Kharanotis en direction de l’Hôtel du Bord de Mer. Un haut grillage séparait la route des marais et, par une percée dans le feuillage, on pouvait apercevoir l’étendue d’eau saumâtre que traversait lentement le fleuve Viridien. Un morphote qui se reposait sur un tronc fit un geste énigmatique et se glissa dans les broussailles. »

Un tour en Thaery

« – Alors allons à la Jiraldra, où nous pourrons parler de Wellas, de Naï le Hever et de ce qu’il y a au-delà de l’Écueil de Zangwill, et je décrirai la musique d’Eiselbar.

– Une idée de grand mérite ! Pendant que nous sommes en vie, il convient de nous asseoir au milieu de lumières colorées pour boire de bons vins et nous entretenir de nos aventures en terres lointaines. Quand nous serons morts, nous n’en aurons plus l’occasion. Les deux hommes regagnèrent le Front de Mer et s’éloignèrent – et l’arbre demeura seul dans la lumière de Skay. »

un monde d’azur

« Le cadavre du Roi Kragen flottait sur l’océan, une carcasse pitoyable. Le crépuscule était déjà descendu ; les tours de transmission clignotaient éperdument ; depuis Tranque à l’est jusqu’à Almack et Sciona à l’extrême ouest, les nouvelles se propageaient. Les intercesseurs contemplaient lugubrement la surface de la mer. Les Exemplaires retirèrent leurs uniformes et, l’air penaud, se mêlèrent à la foule de ceux qu’ils avaient traités avec arrogance si peu de temps auparavant. On se moqua d’eux et on les insulta, mais aucun ne fut malmené ; l’humeur des habitants était bien trop joyeuse. On alluma des lampes jaunes devant chaque maison ; on sortit le plus vieil arak et les eaux-de-vie les plus suaves ; les vieux amis trinquèrent ensemble. Toute la nuit, sous les blanches constellations, ce ne fut que fêtes et réjouissances, et actions de grâce de ce que jamais plus les habitants des îles n’auraient à servir le Roi Kragen, ou un autre comme lui. »

Space opera

« De temps à autre, quand il regardait sa femme, une crainte plus angoissante s’insinuait en lui : et si elle rencontrait un homme de sa propre race ? Elle lui avait assuré qu’aucun n’existait plus sur Terre, mais sur Yan ? Et les pensées de Roger s’envolaient loin, très loin à travers l’espace, jusqu’à une lande caillouteuse près d’une forêt sombre où il y avait un piano en ruine… Peu probable, se disait Roger, peu probable. »

Lyonesse

« Nous porterons un ban ; en premier lieu : à mon épouse absente, la reine Glyneth, et à la toute nouvelle princesse Serle !

  En second lieu : à Dame Twisk, qui nous stupéfie par sa beauté !

  En dernier lieu : à Madouc, naguère princesse de Lyonesse, qui fut réduite à devenir « Madouc la vagabonde » et qui, par décret royal, redevient aujourd’hui Madouc, princesse de Lyonesse ! »

Cadwall

« Ces histoires d’errants et de vagabondages m’ont rendu nerveux. Je ne suis jamais allé nulle part, hormis Soum pour une semaine d’excursion, au cours de laquelle j’ai vu dix brasseries et quatre temples. Tout le monde raconte des détails sur l’Ancienne Terre ; certains la louent immodérément ; d’autres me disent que quand on sort ses chaussures pour les faire nettoyer, on se les fait voler. Il faut que je voie cela par moi-même. Quand je reviendrai, je serai Président du Nouvel Orphée. Le grand rêve de Floreste finira donc par se réaliser.

Cora Tamm arrivait avec une nouvelle théière et, assis sur la terrasse, le petit groupe regarda le soleil se coucher parmi les collines au-delà du fleuve. »

Escales dans les étoiles

« Pendant quelques instants encore, il resta à regarder par le hublot. Finalement, loin là-bas dans le vide, il crut voir une petite lueur, qui devait être l’étoile Frametta. »

Cugel saga

« Peu importe, conclut Cugel. Ce soir, nous nous en passerons. Iucounu, où que tu sois, dans le monde d’en-bas, dans le monde d’en-haut, ou dans aucun monde du tout, nous buvons ton propre vin en souvenir de toi ! C’est la plaisanterie de la fin, et bien qu’elle ne soit pas très drôle, elle s’exerce à tes dépens et réjouit donc la compagnie ! Sylphides, à vos carafes ! Amis, à vos coupes ! Bazzard, avez-vous goûté cet excellent fromage ? Vasker, un autre anchois ? Que la fête continue ! »

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